Notre-Dame et la Porte du Diable
Entre 1859 et 1867, Pierre Boulanger est chargé de restaurer les pentures des portes latérales de la Cathédrale de Notre-Dame de Paris. Mais Paris hurle au scandale, grâce aux travaux d'Eugène Viollet-le-Duc, Boulanger va modeler des arabesques pour les portes centrales, "c'est impossible : le portail de Notre-Dame n'a jamais eu que deux portes latérales et n'en aura jamais d'autre."
En fait, tout descend de la légende du ferronnier et serrurier Biscornet (qui a d'ailleurs une rue dans Paris à son nom depuis le XIXe siècle) qui vécut au XIIIe siècle. Il est à l'origine du travail remarquable en fer forgé qui recouvre délicatement le bois des portes latérales du lieu Saint. Le métal et l'ouvrage sont d'une qualité telle issue d'un travail tellement complexe qu'on ne pouvait l'attribuer au travail d'un homme, seul le Diable aurait pu avoir autant d'habilité grâce à ses mains... C'est ainsi que naquit la légende de Biscornet et donc les superstitions qui l'entourent.
Il y a bien des versions ; on en trouve des traces dans la plupart des historiens de Paris ; voici celle qui a été transmise de génération en génération dans une famille de serruriers.
Au douzième ou treizième siècle, vivait un ouvrier très maladroit, qui allait d'atelier en atelier, sans jamais pouvoir obtenir la maîtrise. Un jour, il était employé dans un port de mer ; on forgeait des ancres ; le travail de soudure d'une de ces énormes pièces de fer ne réussit pas. On l'accusa de ce mécompte ; ses camarades le battirent, puis ils allèrent au cabaret.
Le pauvre ouvrier pleurait dans un coin de l'atelier, lorsqu'il vit venir à lui un home tout de rouge habillé qui lui demanda le motif de son chagrin.
Quand il eut raconté sa mésaventure, l'homme tout de rouge dit :
- Rassure-toi ; rallume la forge ; nous allons souder l'ancre.
L'ouvrier obéit en tremblant.
Lorsque les fers furent incandescents, il les rapprocha sur l'enclume ; mais au moment de lever le marteau, la force lui manqua et il laissa échapper son outil.
L'homme rouge, alors, frappa sur le fer un grand coup de poing et l'ancre fut soudée. Puis il dit à l'ouvrier :
- Je suis le Diable. Si tu veux faire un pacte avec moi tu seras le plus adroit des serruriers et tu pourras entreprendre tous les ouvrages que tu voudras.
Sans attendre de réponse, il disparut, laissant à l'ouvrier deux pièces d'or qui étaient comme les arrhes du pacte ; et le serrurier eut sur le front deux petites cornes.
Lorsqu'il alla rejoindre ses camarades au cabaret, ceux-ci le traitèrent de fou et lui donnèrent le surnom de Biscornet, qui est, parvenu jusqu'à nous.
A partir de ce moment, cet ouvrier fut très habile, il fit de très beaux ouvrages de serrurerie. Dans une circonstance difficile, l'homme rouge apparut une seconde fois, et après l'avoir tiré d'un mauvais pas, le somma de signer le pacte qui le lierait à lui.
Biscornet donna au diable son âme et lui promit son premier enfant mâle.
A quelque temps de là, le travail des portes de Notre-Dame de Paris fut proposé. Aucun ouvrier ne voulut s'en charger. Biscornet l'entreprit ; soigneusement enfermé dans son atelier, il le mena rapidement à bien avec l'aide du Diable. En une seule nuit, ils mirent en place les deux portes latérales : Biscornet, celle du Nord, par laquelle on fait le service habituel ; le Diable, celle du Sud, que l'on n'ouvre presque jamais et que l'on appelait encore, il y a trente ou quarante ans, la Porte du Diable.
Quant à la porte du milieu, comme elle fait face au sanctuaire, et qu'elle donne passage à la procession du Saint-Sacrement, le Diable était impuissant à la faire.
Voilà pourquoi, ajoute la légende, le portail de Notre-Dame n'a jamais était complété.
Cependant, le Diable et Biscornet étaient souvent en discussion. Biscornet ne voulait pas se marier de peur d'avoir un fils et d'être obligé de le donner au Diable. Celui-ci, à bout de patience, saisit Biscornet, et l'emporte dans l'espace.
L'ouvrier comprend alors toute l'étendue de sa faute ; il implore l'assistance de Dieu avec tant de ferveur que le Diable perdant de sa force passe trop près de la croix qui surmonte le clocher d'une abbaye. Biscornet s'y accroche ; aussitôt le Diable est sans force et lâche Biscornet, qui descend au milieu des moines pour ne plus les quitter. Il est mort dans cette abbaye en état de sainteté.
Telle est la légende des portes de Notre-Dame de Paris
Toutefois, une autre version trouvée par l'équipe des Marshals HP précise que la Porte du Diable ne s'ouvrit pas lors de l'inauguration de la cathédrale. Ce n'est qu'après avoir été aspergé par de l'eau bénite qu'elles s'ouvrir et que Biscornet fut délivré de son pacte. D'autres rapportent aussi que les pentures auraient été forgées directement dans les flammes de l'Enfer.... Le mystère demeure et l'ouvrage reste remarquable quoiqu'on en pense.