La Structure des Mythes par Claude Lévi-Strauss
Grand spécialiste des mythes, Claude Lévi-Strauss nous en donne ici une définition.
On ne peut que conseiller de lire l'Anthropologie structurale de Claude Lévi-Strauss et son chapitre sur La Structure des mythes dont je vous mets l'introduction. Un chapitre présentant une nouvelle méthode rigoureuse d'analyse des mythes, faisant avancer tout un pan de la recherche.
« On dirait que les univers mythologiques sont destinés à étre pulvérisés a peine formés, pour que de nouveaux univers naissent de leurs débris. »
Franz BOAS, introduction à : James Teit, "Traditions of the Thompson River Indians of British Columbia," Memoirs of the American Folklore Society, VI (1898), p. 18
Depuis une vingtaine d'années et malgré quelques tentatives dispersées, l'anthropologie semble s'étre progressivement détachée de l'étude des faits religieux. Des amateurs de provenances diverses en ont profité pour envahir le domaine de l'ethnologie religieuse. Leurs jeux naïfs se déroulent sur le terrain que nous avons laissé en friche, et leurs excès s'ajoutent à notre carence pour compromettre l'avenir de nos travaux.
Quelle est l'origine de cette situation ? Les fondateurs de l'ethnologie religieuse : Tylor, Frazer et Durkheim, ont été touours attentifs aux problèmes psychologiques ; mais, n'étant pas eux-mêmes des psychologues de métier, ils ne pouvaient se tenir au courant de la rapide évolution des idées psychologiques, et encore moins la pressentir. Leurs interprétations se sont démodées aussi vite que les postulats psychologiques qu'elles impliquaient. Reconnaissons-leur cependant le mérite d'avoir compris que les problémes d'ethnologie religieuse relèvent d'une psychologie intellectualiste. A la suite de Hocart - qui en faisait déjà la remarque au début d'un ouvrage posthume, récemment publié - on regrettera que la psychologie moderne se soit trop souvent désintéressée des phénomènes intellectuels en leur préférant l'étude de la vie affective : « Aux défauts inhérents à l'école psychologique... s'ajoutait ainsi l'erreur de croire que des idées claires puissent naître d'émotions confuses[2]. » Il aurait fallu élargir les cadres de notre logique pour y inclure des opérations mentales, en apparence différentes des nôtres, mais qui sont intellectuelles au même titre. Au lieu de cela, on a essayé de les réduire à des sentiments informes et ineffables. Cette méthode, connue sous le nom de phénoménologie religieuse, s'est trop souvent montrée stérile et fastidieuse.
De tous les chapitres de l'ethnologie religieuse, c'est la mythologie qui souffre surtout de cette situation. Sans doute peut-on citer les travaux considérables de M. Dumézil et ceux de M. H. Grégoire. Mais ils n'appartiennent pas en propre à l'ethnologie. Comme il y a cinquante ans, celle-ci continue à se complaire dans le chaos. On rajeunit les vieilles interprétations : rêveries de la conscience collective, divinisation de personnages historiques, ou l'inverse. De quelque manière qu'on envisage les mythes, ils semblent se réduire tous à un jeu gratuit, ou à une forme grossière de spéculation philosophique.
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