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Une fiche détaillée du Nykur ou Kelpie

Nykur. Le Cheval sortie des eaux

 

Des traces de cet animal ainsi que des témoignages s'y rapportant se sont propagés dans plusieurs régions du Nord de l’Europe. Vous l’y trouverez sous différentes appellations, en Islande (où il s’agit certainement de la créature légendaires non humanoïde la plus célèbre) en tant que Nykur, Kelpie (un mot dérivé du gaelique écossais cailpeach ou colpach, signifiant génisse ou poulain) en Écosse ou bien Nuggle dans les îles Orcades et Cabbyl-Ushtey dans les îles Shelton.

Toutefois, il est parfois dur de regrouper les sources le concernant car, rien qu’en Islande, on le désigne par de nombreux surnoms Skolli (Diable), Kumbur (touffe), Flóðhestur (hippopotame), Vatnaskratti (démon des eaux) et au moins quatre noms propres ont été préservés par écrit : Árvíkur-Blesi (Incendie), Brúnn (Brownie), Ginfaxi (Majestueuse Crinière), et Nykurgráni (Eau Grise).Tandis que dans les îles Orcades vous le trouverez aussi en tant que Noggelvi et comme Shoopultee aux îles Shetland. Reste aussi à savoir si l’Uisge d’Écosse, n’est pas lui aussi au final un Nykur plus vicieux.

 

 

 

Origine

Au vue de ses localisations géographiques, et de la ressemblance d’un certain lexique propre au Nykur particulièrement proche du mot « nokk » en vieux Norrois, on est en droit de supposer que l'espèce se serait propagée grâce au mouvement des Normands et leurs activités dans ces régions du monde. Toutefois, le manque de sources traitant de l’animal dans les pays d'origines des vikings (Suède, Norvège ou Danemark), nous pousse à croire qu’il serait originaire de l'un des pays alors visités. Ce serait donc par l’entremise de marchandage maritimes entre ces îles que l'animal aurait agrandit son territoire. Reste alors à savoir avec quels autres animaux le Nykur aurait pu s'accoupler ou s’il s’agit juste une évolution locale, pour expliquer ses caractéristiques physiques ou culturelles divergentes selon les pays occupés.

On notera aussi sa longue présence en Islande car il est déjà mentionné dans les écrits les plus anciens comme le Landnámábók (le Livre de la Colonisation, écrit au XIIe siècle). Il y est décrit comme pommelé-gris et habitant l’île depuis longtemps, un lac à Hraunfjörður sur la péninsule de Snæfellnes entre-autres.

 

 

Description

Malgré les distances géographiques séparant les témoignages sur les diverses activités de l’animal, ses caractéristiques restent, à peu de chose près, les mêmes.

 

Sa principale caractéristique est d'être métamorphe, même si généralement il choisira la forme d’un magnifique cheval placide, un peu plus grand qu’un équidé ordinaire (ou plus car en 1910, où un chasseur de canards aurait aperçu une créature  à tête de cheval de 5 m et demi autour du lac Shapinsay). C’est donc sous cette forme que vous êtes le plus susceptible de l'appercevoir autour des lacs et des cours d’eau profonds particulièrement difficile à franchir, toutefois, le collecteur de folklore islandais, Jón Árnason entendit que le Nykur aurait aussi été aperçu sortant de la mer. À cette occasion, il prend généralement la forme d’un taureau (et prendra le nom de « Taureau des mers »). Prompte à sa description de par la forte population de Nykur habitant l’île, les Islandais ont aussi été en mesure de nous affirmer son choix quasi constant de la couleur grise, une grande crinière et un large cou.

Notons aussi que, même si le Nykur ne vous laissera pas l’inspecter, ses sabots ne sont pas fendus. Ils ressembleraient plutôt à un cercle uniforme avec un creux à l’intérieur, ce qui le rendrait plus apte à la nage. Mais là où les témoins hésitent, c'est sur ses jambes, certains expliquent que ses fanons pointent à l’opposé de celles d’un cheval traditionnel (sur le devant de ses jambes, il possèderai de longs poils tandis que sur l’arrière, ils seraient beaucoup plus courts) et cela laisserait à penser que ses sabot serait tourné dans le mauvais sens. Toutefois témoignage diverges comme celui de Jón Bjarnason (environ 1791-1861) de la ferme de ƥórormstunga,  qui écrivit en 1850, que les sabots du Nykur sont bel et bien montés à l’envers, tout comme ses oreilles. À cela s’ajoute également une vessie sous sa hanche gauche.

 

Mais, toujours aujourd’hui, il ne s’agit pas là de caractéristiques fixent, puisque la nature même du Nykur lui permet de se métamorphoser sous diverses formes. En effet, si la créature aime à se présenter dans une magnifique apparence, il arrive qu’elle se présente dans une forme peu attrayante voire grotesque. Ainsi on parle aussi parfois de Nykur à 12 pattes par exemple, l’un d’entre eux aurait été aperçu parmi des éboulis entre les fermes de Kolfreyjustaður et Vattarnes à Fáskrúðsfjörður, (un village des fjords de l’Est) juste avant une période de mauvais temps. Et d’autres sources lui prêtent d’autres couleurs allant du brun au blanc comme au rose au jaune clair. L’un d’entre eux fut aussi aperçu avec « une large marque au milieu de son front ce qui donnait l’impression qu’il n’avait qu’un œil » et un autre encore avec des joues rouges.

 

 

Activités de la créature

Le Nykur est principalement connu pour les nombreuses noyades qu’il a provoquées dans toutes les régions où il a été localisé. Jón Bjarnason fournit quelques explications supplémentaires dans ses textes de 1850. Il est d’avis que le Nykur et le Vatnagýgur (le géant d’eau) serait la même bête qui essaierait de tenter les gens à la monter pour ensuite les submerger dans le point d’eau le plus proche pour les y faire périr. Le but de cette course effrénée serait alors de manger ses victimes, bien que cette précision ne soit donnée que lors de cas exceptionnels (en Islande et sutout en Écosse). Pour faciliter aux victimes de monter sur son dos, il n’hésiterait pas à se coucherait puisqu’il était, dans la plupart des circonstances, plus grand que les chevaux ordinaires. Dans les récits écossais du Kelpie, on nous l’explique que c'est grâce à sa peau collante qu'il peut empêcher quiconque de descendre de son dos. Une histoire nous raconte les mésaventures de 10 enfants face au Kelpie. Celui-ci avait déjà attiré 9 des enfants sur son dos et il tentait d’amadouer le dixième. Lorsque ce dernier toucha le museau de l’animal, son doigt s’y colla définitivement et ce n’est qu’en se le tranchant qu’il parvint à échapper à la course folle du Kelpie vers le lac. Les 9 autres enfants furent entraînés et noyes dans les flots, plus jamais on ne les revit. Toujours en Écosse, il est aussi connu que les Kelpie peuvent choisir l’apparence d’une belle jeune femme dans l’espoir d’attirer les hommes ou bien celle d’un homme velu caché dans la rivière, près à sauter sur les voyageurs sans méfiance, pour les écraser à mort comme dans un étau.

 

 

The Kelpies, at The Helix, Scotland

On pense que l'aminal est annonciateur des changements climatiques car lorsque qu’il rugit ou hennit cela n’annonce rien de bon. En Islande, une rencontre fortuite avec un Nykur dans le brouillard serait particulièrement malvenue et dangereuse. En Écosse, le son de sa queue entrant dans l’eau ressemble à celui du tonnerre et ses lamentations ou hurlements prédissent une tempête approchante. Les écossais le soupçonnent aussi d’user de pouvoirs magiques pour rassembler les eaux afin de ramener à lui un voyageur éloigné en le submergeant grâce à une inondation.

 

Dans Íslandslýsing (Une Description de l’Islande) par ƥorlákur Markússon (1692-1736), on apprend que ces « malus genius […] peuvent causer certains dommages lorsque que les gens se trouvent près les trous de pêche au milieu de la glace. Ils peuvent briser celle-ci et chercher à noyer ceux qui y prennent appui sauf si ils sont alertes et sur leur garde. » Un récit appuyé plus tard par Jón Ólafsson (1705-1779) de Grunnavík qui raporte les dires de personnes qui ont « souvent entendu de l’agitation et du bruit provenant des lacs habités par la créature, particulièrement en soirée. Puis on voit parfois la créature émerger de l’eau, et, si le lac est gelé, elle en viendra à briser la glace. De plus, ils racontent qu’il se trouve toujours une fissure sur la glace sous laquelle il se trouve. Certains pensent aussi que les bruits venant du lac s’accentuent lorsque la peau du cheval entraîne la glace avec lui dans les profondeurs. »

 

 
Le débusquer

En Islande, nombre de lieux-dits (les exemples ne seront donc pas tous indiqués sur les cartes) indiqueront la présence du Nykur dans les environs : Nykhóll, Nykurborg, Nykurfoss, Nykurhylur, Nikurhylsfoss, Nykurhylsgljúfur, Nykurlág, Nyrkurpyttur, Nykurskál, Nykurstallar, Nykurtjarnarhóll, Nykurtjarnarlækur, Nykurtjörn et Nykurvatn, etc. Mais des noms plus subtils peuvent aussi vous mettre sur sa voie comme l’étang de Kumburtjörn (kumbur signifiant touffe) ou d’autres feront référence à des incidents comme à Skagi dans la région d’Austur-Húnavatnssýsla où un Nykur traîna 7 ou 8 enfants vers le fond du lac et les y noya. Le lieu porte désormais le nom de "lac aux enfants". Bien sûr, il ne s’agit là que d’une liste non-exhaustive de lieux connus en Islande car tous les énumérer serait difficile au vue de leur grand nombre et de leur dispersion tout autour de l’île. Alors que dans les îles des Orcades, il ne reste que de faibles allusions dans les zones que l’on pensait hantés par la créature comme le lieu isolé d’Hoy (The Water o’Hoy), ou encore Pegal Burn ou le Little Loch à Rack Wick. En Écosse, Falkirk serait la maison des Nykur d’où la présence en ville de la plus grande sculpture d’équidés du monde dans Helis Park.

C’est à vous de mener l’enquête et d’être, en ces lieux, d’une grande prudence.

 

 

 
Sa capture

Il vous faudra faire preuve de prudence car c’est un animal rusé et trompeur mais qui possède plusieurs points faibles.

Si vous vous retrouvez en danger, n’oubliez pas que, d’après Jón Bjarnason, « le Nykur ne peut supporter d’entendre son nom prononcé, ni aucun mot qui lui ressemble ; si jamais cela devait arriver, il en deviendrait violent et se ruerait dans l’eau au galop. » Le mot Diable créerait aussi ce phénomène de panique en lui, comme la prière à Dieu ou le signe de croix. Il en serait de même s’il apercevait une église ou si les cloches de celle-ci se feraient entendre. Un conte nous explique comment un Nykur tentait de traîner une jeune fille endormie vers un lac, celle-ci se réveilla et cria «  Laisse-moi tranquille, Nykur ». La créature la laissa immédiatement tomber et se rua dans l’eau pour y disparaitre.

 

En revanche, si vous souhaitez le débusquer de son habitat pour de bon, il est recommandé d’y garder un feu allumé toute une journée, cela fut prouvé à la ferme de Pollalækur dans la vallée de Svarfaðardalur en Islande. En utilisant de l’eau bénite on obtiendra aussi un bon résultat, où du moins se fut la méthode adoptée pour faire fuir la créature vivant dans l’embouchure de la rivière Fossá qui se jette dans Berufjöður dans l’Est de l’Islande. Attention toutefois de bien noter les différents habitats du Nykur car parfois il déménage de lacs en lacs (deux ou trois, voire plus) via un tunnel souterrain, un passage qu’il effectue fréquemment lors du dernier jour de l’année car il passe généralement un an dans chaque habitat. Ces passages lui permettront donc de fuir comme de revenir.

 

Le Nykur a le pouvoir de la Bête et si vous souhaitez l’apprivoiser, vous allez devoir faire éclater une balle sous son épaule gauche mais cela ne le domptera qu’un court laps de temps... En Écosse, on a découvert grâce au clan MacGregor que toute personne qui mettrait la main sur sa bride pourrait le dominer lui ainsi que tous les autres. En effet, l’un de leur ancêtre en aurait prise une à un Nykur du Loch Slochd. Un avantage certain car un Nykur posséderai la force et l’endurance d’au moins 10 chevaux.

Dans un chapitre du Landnámábók (le Livre de la Colonisation de l’Islande), on apprend qu’un Nykur hantait le district de Skagafjörður. Ce dernier se serait accouplé avec Fluga, l’une des juments du colon ƥórir Nez de Pigeon. Les écrits indiquent que Fluga était de la même nature que son amant et leur progéniture fût appelé Eiðfaxi et il connu une bien mauvaise fin. Il fut transporté en Norvège où il causa la morts de 7 personnes en un seul jour et en mourut. La Saga de Hrafnkell se déroulant dans l’Est de l’Islande, (certainement mise par écrite au XIIIe siècle) raconte entre autres que le fameux cheval Freyfaxi, un était le descendant d’un Nykur : « un poulain aux dimensions énormes gris-pommelé d’une identité inconnue. » Cette histoire fut suivit d’un long silence jamais brisé dans les écrits islandais avant 1638 avec Gísli Oddson (1593-1638), évêque du siège épiscopale de Skálholt qui avait une grande connaissance des Nykur. Celui-ci précisait : « Je pourrais facilement être d’accord sur le fait que cette manifestation soit le fait d’esprits malicieux, si cela n’était pas contraire aux extraordinaires histoires que j’ai quelquefois entendu sur des Nykur utilisés dans les fermes comme cheval de bât ou pour de l’équitation, un mauvais esprit ne pourrait qu’avoir des difficultés à occuper de telles tâches. » Une version confirmée par le poète et naturaliste Eggert Ólafsson (1726-1768) qui a beaucoup voyagé autour de l’Islande, il était familier des différents noms attribués à la créature et expliqua qu’on ne la trouvait que dans les lacs sans fond. Il serait d’après lui d’un gris clair, « parfois des personnes l’ont monté ou utilisé comme cheval de bât sur une partie de la journée. Elle peut aussi féconder une jument et les poulains qui en résultent ont une certaine tendance, lorsqu’il rentre dans l’eau jusqu’aux genoux, à s’y jeter pour s’y rouler dedans, et ceci indépendamment de la charge ou du cavalier qu’ils portent. »

Toutefois dans les Shetland, il est dit que seul un Finman (un autre personnage de leur folklore : un homme bien fait aux compétences de navigation incomparable) était susceptible de le monter. En effet, une seule tentative de domptage faillit être fructueuse sur l’île, un jour un groupe d’homme réussit à capturer un Nykur. Ceux-ci enchaînèrent la créature désespérée sur une pierre entre deux lacs, mais après avoir beaucoup et longtemps lutté, le Nykur s’échappa. Aujourd’hui encore on peut voir la trace de se combat acharné avec les marques de chaînes incrustées dans la pierre.

 

Finissons sur un extrait d’un poème de Robert Burns, Address to the Deil :

"…When thowes dissolve the snawy hoord
An' float the jinglin' icy boord
Then, water-kelpies haunt the foord

By your direction
And 'nighted trav'llers are allur'd
To their destruction..."

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